Un lecteur voyageur nous raconte cette histoire digne d’une chanson… de Leonard Cohen (respect à toutes les Suzanne, au passage)

Très jolie histoire que Jean-Luc avait publié sur son propre blog. Merci à lui de nous autoriser à la partager ici. C’est ça aussi la fraternité du voyage. (Ma partie préférée est la fin, ce PS qui offre une chute impensable). Je vous laisse avec cette aventure féline.

La lune semble s’échapper de l’horizon. Doucement, comme une plume, elle s’élève. Comme tous ces fous qui aiment la lune, il me fallait y aller. Depuis le port du Pirée, le bateau glisse sur l’eau. Il file vers ce qui sera un grand matin. Le sablier se vide, j’ai l’impression douce de me noyer dans le vent qui souffle sur cette petite île grecque. À Hydra, seuls les ânes et les mulets ont droit de se faufiler dans les ruelles étroites qui serpentent à travers des maisons blanches et paisibles. Le maître du temps, caméraman divin, a appuyé sur pause. Dans l’une d’elle, posée en haut de marches interminables, Léonard Cohen y est resté 7 ans… Il y écrivit des romans et, sans doute, ses plus belles chansons. Léonard avait tellement de fissures que la Lumière pouvait se voir en lui. Sa maison ne se visite pas mais, sur un papier posé sur la porte, une écriture manuscrite, demande « S’il vous plaît, merci de ne pas frapper ». Peut-être Léonard est-il en train de dormir… Ce lieu magique, aux maisons accrochées les unes aux autres, posé dans le golf Saronique, avec ses coquelicots d’un rouge profond, presque carmin, qui jaillissent au milieu d’Euryops d’or et se courbent comme une chevelure sous le vent, est un bel endroit pour se débarrasser de sa vieille peau. Et peut-être, se retrouver. Ici, les mots ne sont pas muets. On peut parler aux dieux et, rêver qu’ils nous écoutent. On est hors du temps. On est bien. Je me suis demandé si je ne devais pas rester là, y finir sous ce voile si doux qui ressemble tant à la sérénité parfaite. Quelle paix ! Alors, je me suis dit que j’allais faire de ce moment un de mes plus beaux souvenirs et avant de quitter l’île, je me suis étendu sur un mur des remparts du fort, près d’un canon. Alors, un chat a grimpé sur moi. C’était un chat tigré, double masculin de mon amoureuse féline, Marcelle, loin, si loin de moi, en ce jour d’avril. Il accepta avec une douceur tendre, mes caresses. Sur moi, il s’est lové, abandonné. En cet instant précis, nous étions faits l’un pour l’autre. Et puis, il s’endormit, posé sur moi et doucement, a glissé dans l’astral, m’emportant avec lui. Peut-être était-ce la réincarnation de Léonard Cohen car jamais mon sommeil ne fut traversé d’une telle élégance ! C’est ça, Léonard est un chat et je l’ai rencontré ! So long…

Jean-Luc Gironde

PS : Dans l’avion qui me ramenait à Paris, ma voisine de siège, une jeune américaine, m’a regardé longuement avant de me dire « Mais je vous connais ! » » J’étais interloqué, alors elle a pris son téléphone, a cherché dans ses photos et m’a montré une image qu’elle avait prise quelques jours auparavant. On y voyait un homme en noir avec un chat. Les deux dormaient sur un rempart ! C’était moi et le mystérieux félin. Elle m’a demandé l’autorisation de publier sur ses réseaux, la photo. J’ai écrit sur l’écran, avec mon doigt, comme on le fait quand on reçoit un colis « Ok for publishing », je n’ai pas osé « Sincerely. Leonard Cohen » !!!